L'incident de la passe Dyatlov (2ème partie)

Publié le par Taranto

Compte-tenu des éléments étranges, une autre approche fut envisagée dès 1959.


Igor Dyatlov, janvier 1959



A cette date, cela fait deux ans que l’Union Soviétique a placé le premier satellite artificiel dans l’espace à partir du cosmodrome de Baïkonour. Deux ans plus tard, Yuri Gagarin deviendrait le premier homme envoyé dans l’espace. De nouvelles technologies étaient développées et mises à l’essai dans un climat de secret typique de la Guerre Froide.




L’enquête officielle fut rapidement clôturée et, quand des journalistes et des parents cherchèrent à consulter ses éléments, ils s’aperçurent que certains documents n’étaient plus disponibles, peut-être classés secrets. De nombreuses personnes commencèrent à croire que la mort des jeunes randonneurs auraient pu avoir une origine humaine : ils auraient été les victimes des suites d’un test militaire.


C’est en particulier la conviction de Yuri Yudin, le seul rescapé. Sa conviction se fonde sur les éléments révélés au public lors du ré-examen du dossier en 1990 par des journalistes locaux.


Quand la mission de secours arriva sur le site du dernier campement, un des sauveteurs portait un appareil de mesure (dosimètre ou compteur Geiger selon les sources) qui détecta un quantité inhabituelle de radioactivité. Des traces de radioactivité devaient être aussi détecté sur certains vêtements des randonneurs.


Equipe de recherche, février 1959



Le dossier comprenait également plusieurs témoignages signalant des phénomènes lumineux étranges dans la région en février et mars 1959, avec des observations particulièrement nombreuses autour du 17 février. Un témoignage particulièrement important est celui d’un autre groupe de randonneurs, des étudiants en géographie, qui se trouvaient à 50 km au sud du groupe de Dyatlov la nuit du 1er février : ils déclarèrent avoir vu cette nuit-là des sphères lumineuses oranges, des boules de feu, flotter en direction du mont Kholat Syakhl.


Yudin aurait également eu accès à des documents militaires montrant que l’armée aurait lancé une enquête dès le 6 février, soit 14 jours avant la découverte du dernier campement. Il pensait également que les militaires étaient arrivés plus tôt : ayant du identifier tous les objets trouvés sur le site, il n’avait pas pu se prononcer sur une paire de lunettes, une paire de skis et un morceau de tissus ressemblant à ceux portés par les soldats.


Cependant la thèse de l’accident militaire souffre de nombreuses faiblesses. Les différentes équipes qui se succédèrent sur le site de février à mai 1959 ne relevèrent que les empreintes laissées par les étudiants, ni signes d’explosion, ni traces non identifiées. En 2007, une nouvelle recherche permettait de retrouver de nombreux débris métalliques, mais ceux-ci sont selon toute vraisemblance beaucoup plus récents, remontant probablement aux années 1970s quand fut mise en place une route aérienne au-dessus des montagnes de l’Oural.


Au moment de l’incident, la base aérienne la plus proche se trouvait près de Sverdlosk, soit à 600 km des pentes du Kholat Syakhl : à cette époque, aucun appareil n’avait une autonomie de vol de plus de 200 km. Un engin balistique tiré depuis le cosmodrome de Baïkonour aurait pu atteindre le nord de l’Oural, mais les archives indiquent qu’il n’y avait pas d’activités à ce moment. Le cosmodrome de Plesetsk se trouve plus près mais les premiers tests remontent à juillet 1959 et il ne fut déclaré opérationnel que le 15 décembre 1959.


La radioactivité détectée sur le site peut aussi être expliquée. En 1958, soit quelques mois avant le drame, un accident nucléaire majeur avait eu lieu à Sverdlovsk : une fuite dans un réacteur avait provoqué la création d’un important nuage radioactif qui s’était répandu sur la région. Quant à la radioactivité retrouvée sur les vêtements, il s’agissait de traces détectées sur le manteau en fourrures de Dubinina qui pourrait provenir de ses actvités d’étudiantes dans un laboratoire de l’Institut Polytechnique de l’Oural.


Malgré ces éléments, il ne faut pas oublier que la ville de Sverdlovsk était une cité fermée, partie intégrante du complexe militaro-industriel soviétique. En 1960, c’est en survolant le district de Sverdlovsk que fut abattu l’avion espion américain U-2 : selon la thèse officielle, il fut descendu  par des salves de 14 missiles antiaériens, missiles qui ont du être déployés et testés.




Une autre hypothèse a été avancée par des proches de Dyatlov et des randonneurs chevronnés. Une coulée de neige aurait pu frapper le campement au milieu de la nuit, paniquant les étudiants au point de découper la tente et de fuir en toute hâte dans l’obscurité. Ils se seraient regroupés ensuite autour du grand pin, essayant d’allumer un feu pour survivre au froid. En escaladant l’arbre pour couper des branches, Slobodin serait tombé de 3 – 4m de hauteur, se blessant à la tête : ce serait compatible avec les traces relevées sur le tronc et l’examen de sa blessure.


Constatant qu’il ne s’agissait pas d’une grosse avalanche, Dyatlov, Slobodin et Kolmogorova auraient essayé de rejoindre leur campement pour récupérer du matériel de survie, malheureusement en vain.


Menacés par le froid et ne voyant personne revenir, Thibeaux-Brignolle, Dubinina, Kolevatov et  Zolotaryov auraient décidé de rejoindre leur camp de base. Epuisés, ils auraient progressé dans l’obscurité jusqu’aux abords d’une ravine, peut-être partiellement cachée sous la neige. Selon un membre de l’équipe de secours, la hauteur de la ravine variait entre 3 et 5 m dans la zone où furent découverts les skieurs ; la pente avait une inclinaison d’environ 30 à 40° ; la pente opposée était plate ; la largeur de cette ravine était d’environ 40 m ; il est fort possible que les blessures relevées aient été provoquées par une chute soudaine.


Les sauveteurs et la ravine où furent découverts 4 corps



Restés près du feu, Krivonischenko et Doroshenko auraient vainement tenté de l’alimenter avant de succomber au froid…


L'aspect bizarre des corps, qui avait choqué des proches, pourraient s'expliquer par leur exposition prolongé aux conditions hivernales de l'Oural. de fait, les photographies des corps ne semblent pas révéler une allure anormale.


Cette théorie semble apporter une solution logique et plausible à l’incident. Pourtant, persiste certaines zones d’ombre.


Les différentes équipes qui se sont succédées sur les lieux n’ont relevé aucun signe d’avalanche. La tente, les empreintes laissées par les randonneurs et même les corps découverts entre le pin et le camp n’avaient été recouverts que par une couche de neige superficielle.


Les conditions propices à une avalanche se trouvent surtout en période de redoux, ce qui n’était pas le cas en février 1959. Il faut aussi des pentes assez raides, alors que la zone du campement était entourée de collines avec des pentes de l’ordre de 23 –25°, un endroit assez propice pour qu’un groupe de randonneurs expérimentés y dresse un campement.


Même si une avalanche s’était produite, les données géophysiques montrent qu’elle serait passée loin de la tente.


Enfin, au cours de la centaine d’expéditions sur ce secteur qui ont suivi l’incident, il n’a jamais été fait mention d’une avalanche…


Krivonischenko, Dubinina, Zolotarev et Kolmorogova, janvier 1959



Que s’est-il alors passé en février 1959 sur les pentes du mont Kholat Syakhl ? Il n’est pas encore possible de le dire avec certitude. Mais l’histoire tragique des neuf étudiants  ne sera pas oublié : l’endroit où ils ont trouvé la mort a été renommé Passe de Dyatlov.


Site complet sur l'incident (anglais)

Site plus critique (anglais)

Publié dans Histoire secrète

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